Apple défend l'impossibilité de changer les apps par défaut dans iOS

Ce n'est pas demain la veille qu'Apple autorisera le changement des applications par défaut dans iOS, et tout particulièrement Safari. Le navigateur web est en effet considéré comme une « application du système d'exploitation », selon le mot de Kyle Andeer, vice-président en charge des questions juridiques de l'entreprise. Ce dernier a répondu aux questions que les membres du comité de la magistrature de la Chambre des représentants ont envoyé à Apple mi-septembre.

Safari, tout comme les apps Téléphone, Appareil photo et Messages, sont des applications qu'Apple considère comme partie intégrante d'iOS. Les supprimer ou les remplacer par des applications tierces « détruirait ou dégraderait sévèrement les fonctionnalités de l'appareil », assure Andeer. Étant donné leur position stratégique au sein du système, on voit mal comment la Pomme pourrait dans un proche avenir donner la possibilité d'utiliser d'autres apps par défaut.

Et il en va de même pour le moteur web que tous les développeurs de navigateurs distribués sur l'App Store se doivent d'intégrer. WebKit est inamovible, son rôle étant de « protéger la confidentialité des données et la sécurité ». Le dirigeant d'Apple explique que des sites web mal intentionnés ont trouvé des failles dans d'autres moteurs web et qu'elles peuvent être exploitées. Apple est en mesure de boucher rapidement les trous quand elle en a connaissance, et livrer des mises à jour de sécurité à grande échelle.

WebKit étant open-source, tout un chacun peut apporter sa pierre à l'édifice et contribuer à l'amélioration du moteur, souligne Kyle Andeer. Il convient que plusieurs fonctionnalités ne sont pas offertes aux développeurs tiers :

WebRTC pour la vidéoconférence, car Safari affiche une fenêtre expliquant pourquoi le site web doit enregistrer le micro et la caméra ;

Service Workers, pour lesquels Apple n'a pas trouvé le moyen de prévenir d'éventuels abus ;

la protection contre le pistage qui, selon Apple, doit rester sous le contrôle de l'utilisateur ;

l'API Fullscreen, car Safari a mis en place des garde-fous pour éviter les tentatives d'hameçonnage et autres attaques. Apple n'a pas été encore en mesure de généraliser ces protections pour les navigateurs tiers.

Pour ses propres applications, Apple utilise des technologies et des API privées qui ne peuvent être exploitées par les développeurs de tierce partie. Une situation dénoncée par bon nombre d'entre eux, qui estiment que la Pomme bénéficie ici d'un avantage concurrentiel lui conférant une longueur d'avance. « Il serait difficile, sinon impossible, de proposer le même niveau d'accès [de ces technologies] aux tierces parties », explique le vice-président.

Les ingénieurs d'Apple créent « les meilleurs produits du marché, les plus sécurisés (…) La décision [de ne pas offrir les mêmes technologies aux développeurs tiers] reflète des décisions de design et de développement, pas des décisions commerciales ». Une position qui sera sans doute difficile à défendre devant les régulateurs, mais on verra ce qu'il en sera. Pour contrebalancer, Kyle Andeer met en avant les « innovations et technologies » mises au point par Apple et qui permettent aux développeurs tiers de concurrencer le constructeur : ARKit, Core ML, Face ID, 3D Touch (rangé des voitures) et CarPlay, dont l'accès reste contingenté par la Pomme.

Les contraintes de l'App Store

Autre grief souvent adressé à Apple : les développeurs sont dans l'impossibilité d'indiquer aux utilisateurs de leurs apps comment ils peuvent s'abonner ou acheter du contenu en dehors de l'App Store ; dit autrement les développeurs ne peuvent pas mettre de liens vers leurs propres boutiques dans les applications. Ce qui leur permettrait de contourner plus facilement la fameuse commission de 30% (15% la deuxième année dans le cas d'un abonnement).

Une situation dénoncée par Spotify et qui a forcé plusieurs grands noms, comme Netflix et le service de streaming de musique, à ne plus proposer de s'abonner depuis l'App Store. Concernant l'impossibilité de communiquer sur des offres alternatives dans les applications, le VP file la métaphore avec le commerce traditionnel : « personne ne s'attend ou demande qu'un magasin de brique et de mortier soit dans l'obligation d'afficher un panneau indiquant au consommateur où acheter moins cher tel produit sans la marge prélevée par le distributeur ».

La dîme de 30% prélevée par Apple n'est pas une « taxe », défend-t-il. La commission « reflète la valeur de l'App Store en tant que canal de distribution pour les développeurs, et les coûts associés au fonctionnement de l'App Store ». Ces 30% mis en place dès l'ouverture de la boutique en 2008, sont d'ailleurs devenus la norme dans le secteur. Le modèle d'Apple est « bien plus favorable aux développeurs et permet en bout de course de baisser les prix dans la distribution de contenus numériques dans l'industrie », souligne-t-il encore.

Au passage, Kyle Andeer se paie un petit tacle contre Spotify, qui n'a jamais baissé le prix du forfait premium aux abonnés ayant souscrit une deuxième année via l'App Store (ils sont environ 680 000 dans ce cas). Pourtant, la commission d'Apple n'est plus que de 15%, mais « Spotify a continué à facturer 12,99 $ par mois, comme d'habitude ».